Rechute

Rechute

Depuis quelques semaines, je me sentais tout chose (ce qui explique en partie mon silence sur ce blog et ma relative discrétion sur les réseaux). Ce n’est pas que je n’ai rien à dire – mais ça ne me semblait pas intéressant. Les derniers jours ont été de plus en plus durs, jusqu’à ce que ma chérie me pousse à coups de pieds au derche chez le doc… et me voilà parti avec un traitement contre la dépression.

Signaux faibles

Je ne peux pas dater précisément les premiers signes, ça commence souvent de façon anodine, et chacun réagit différemment. Pour moi ça a été des petits rhumes à répétition (un par semaine), des douleurs articulaires (truc de vieux), des nuits raccourcies, avec un réveil à 5h sans pouvoir me rendormir, et de moins en moins d’entrain à faire les choses du quotidien.

Malgré un changement d’employeur en début d’année (la coop ou je bossais s’est alliée avec une autre coop plus grosse, donc plus de travail mais un nouveau projet super chouette), des avancées sur notre projet de déménagement, et les bons échos rencontrés par le livre de Flo, je sentais que ma motivation se cassait la figure.

Ces dernières semaines étaient de plus en plus rudes, je me sentais de plus en plus las, et un sentiment d’échec m’envahissait de plus en plus souvent. Pourtant, je ne pense pas être à plaindre – je bosse à mi-temps à la maison, on a bien avancé sur le tri du bordel dans l’objectif du déménagement, y’a des visites d’acheteurs potentiels… bref l’avenir se débouche. Mais le revenu dégagé par mon taf’ paye juste les factures, je n’ai aucune marge et ça ne progresse pas vraiment, malgré mes efforts.

L’engagement politique qui me motivait tant ne m’intéresse plus, tant les petites batailles entre les 50 nuances de gauche m’exaspèrent, et que la politique en général se résume aujourd’hui à de grands débats sur l’immigration, l’islamophobie et l’insécurité grandissante partout, puisqu’ils n’ont de toute façon pas les moyens ni l’envie de s’attaquer à l’éducation (qui va mal), la santé (encore pire) et les vrais problèmes des gens qui n’arrivent plus à finir le mois (et ça ils s’en tamponnent). Et on sait que de toute façon, quel que soit le prochain Président, on se retapera les histoires de dettes, de restrictions budgétaires et de riches qui planqueront leur précieux argent ailleurs si on a l’outrecuidance de leur demander de contribuer par l’impôt.

Bref, autant dire que je n’ai plus le goût à grand chose.

Le petit chimiste

On le sait, la dépression a aussi une cause purement chimique. Le cerveau n’arrive plus à fixer et utiliser certaines substances, tournant ainsi au ralenti. Ces derniers jours, j’avais de grandes difficultés à me trainer du bureau au salon pour des actes aussi simples que me nourrir, la flemme même d’aller me coucher (c’est tout un rituel avec la préparation du café pour le matin suivant, la fermeture des accès du RDC avant de monter, et attraper les chats pour qu’ils ne miaulent pas en pleine nuit…)… Autant dire que ça n’allait pas fort.

Le signal a été l’accentuation de ce sentiment de tout foirer, et ma sale manie de me refermer comme une huître dans ces situations. Je parlais de moins en moins, faisant mine d’être intéressé par mon interlocuteur en visio (pour le boulot), et écoutant Flo d’une oreille distraite, alors que nous avons l’habitude de débattre activement en temps normal. Et ce n’était guère agréable à vivre, ni pour moi, ni pour mon entourage.

C’est grave docteur ?

Bref, me voici, dans la salle d’attente du médecin, bien conscient que quelque chose cloche et qu’il va bien falloir trouver une solution. Pas d’idées noires – juste une envie de fermer complètement la coquille – et assez lucide sur la situation, je me confie un peu et on détermine ensemble un plan de combat. C’est pas la première fois que ça m’arrive, j’ai reconnu les signes, mais peut-être un poil trop attendu. Du coup, il va falloir un peu de temps et d’efforts pour qua ça reparte dans le bon sens.

Après la consultation, je suis ressorti de la pharmacie avec ma boîte de pilules, un traitement qui va durer quelques mois pour remettre ma cervelle d’aplomb (ou à peu près), et la certitude que je suis bien entouré en cas de coup dur – et c’est probablement ce que j’ai aujourd’hui de plus précieux !

PS : preuve que je ne foire pas tout, ce blog a changé d’hébergeur et je n’ai pas perdu une virgule de son contenu… ce qui n’est déjà pas mal). Il est désormais résident suisse, et produit autant d’énergie qu’il n’en consomme 🌱

3 Comments

  1. oh tu décris bien les symptômes d’une dépression que je connais par coeur (je fais de rares phases dépressives) , la spirale épuisante et l’auto-dénigrement… que tu évites en expliquant que tu trouves du positif dans ce que tu fais ! c’est bien ça. Tu n’es pas encore dans une dépression forte : tu sais que tu peux t’accrocher à des choses positives et que tu es entouré et que tu as des gens à qui en parler. J’espère pour toi que ce ne sont pas des dépressions régulières et que tu vas vite rebondir ! Il fait beau en ce moment, le soleil est très bon pour le moral, ainsi que la nature. Mais pour ça faut en avoir la volonté.

    • Stéphane Gauthier

      C’est pas la première fois… mais j’ai jamais été bien loin dans les traitements (et ça a rarement duré aussi longtemps). Là c’est vrai que c’est rude mais le traitement commence déjà à produire un petit effet (j’ai réussi à pondre ce billet en une seule fois). Mais je vais surveiller ça sérieusement et faire ce qu’il faut pour que ça reste sous contrôle. C’est une maladie, on a de la chance d’avoir des traitements qui fonctionnent, et j’ai beaucoup de chance d’être bien entouré, donc ça va aller …
      Mais ça fait du bien d’en parler aussi et de pas garder ça pour soi.

  2. oui si tu en parles, tu mets des mots sur tes maux : c’est très important, les choses sortent et tu peux réfléchir sur toi même en écrivant. C’est un des trucs que j’ai appris lors de mes échanges dans le groupe de parole de patients bipolaires, il y a 13 ans.

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