En ces temps de libération de la parole (et c’est très bien ainsi), il est une catégorie dont les revendications ne sont pas toujours audibles : le père divorcé (ou la mère d’ailleurs) qui ne vit pas avec ses enfants. En quoi est-il défendable, me direz-vous ? Il n’avait qu’à pas délaisser le domicile conjugal !!!
Je vais tenter ici de me faire l’avocat du diable…
De plus en plus nombreux
On compte à peu près 130.000 divorces par an en France. Les statistiques sont devenues difficile à établir depuis 2017 et la possibilité de mettre fin au mariage devant notaire. Les chiffres remontés par le ministère de la Justice sont en forte baisse, mais il est impossible de savoir combien d’actes notariés sont prononcés annuellement.
Donc, de plus en plus d’enfants vivent soit en garde alternée, soit sont en visite chez un de leur parent un week-end sur 2 et la moitié des vacances. Ce qui était une exception devient un phénomène de société … ou le parent qui n’a pas la garde a souvent le mauvais rôle.
Ses droits sont souvent niés ou minimisés par la société et les administrations. C’est souvent comme si le père (ou la mère – mais c’est plus rare) n’était plus le parent légitime.
Régime fiscal
Dans mon cas, mes enfants vivent chez leur mère. C’est un choix que nous avons fait ensemble, en toute conscience et dans l’interêt des enfants. En contrepartie, je participe financièrement aux frais de nourriture, d’éducation et tout ça, sans autre avantage que de déduire les sommes versées de mon revenu imposable. Plus de part, plus de crédit d’impôt … pour le fisc je ne suis plus un parent.
Idem pour la Caisse d’Allocations Familiales : la pension ne vient pas en déduction des revenus pris en compte pour le calcul des différentes prestations qui pourraient m’aider (prime d’activité, aide au logement…), mais sera par contre à intégrer au revenu de la personne en bénéficiant, qui à ce titre verra ses prestations baisser d’autant. Et ne parlons pas des aides au départ en vacances : si je veux profiter de ma semaine pour les emmener balader, découvrir le monde, c’est plein tarif.
Co-éducation
A l’école c’est un peu la même chose : les contacts avec l’établissement se limitent au strict nécéssaire (on reçoit une copie du bulletin tous les trimestres), et il est rare que le 2ème parent soit prévenu en cas de nécessité. Pour l’administration scolaire, nous n’existons pas. C’est comme si ne pas vivre au quotidien avec nos enfants faisait de nous des parents-fantômes, sans aucun droit.
J’ai la chance d’avoir gardé une bonne relation avec la mère de mes enfants : je suis donc au courant des événements marquants de leur scolarité, mais combien de parents, en brouille avec l’autre, se retrouvent exclus des processus de décisions, sans possibilité de discuter des choix d’orientation avec les équipes pédagogiques et finalement hors-jeu ?
Le niveau de vie
Au niveau bancaire aussi, nous ne sommes plus grand chose. Quelque temps après ma séparation, j’ai envisagé d’acheter un appartement pout me loger et préparer mes vieux jours. Que d’illusions : mon revenu moins la pension versée grévait sérieusement mes capacités d’emprunt… avec ce que proposait le banquier, je pouvais tout au mieux espérer investir dans une cave ou un garage.
Par ailleurs, en tant que redevenu célibataire, tout est plus cher. Le logement pèse beaucoup plus dans le budget, les courses aussi (les promos au prix de gros c’est bien joli mais ça ne sert à rien), et fini les tarifs famille. Je n’ai pourtant pas l’impression d’être devenu plus riche en divorçant pourtant (et ce n’est pas mon avocat qui me démentira …)
Le regard des autres
Contrairement à ce qu’on peut croire, le parent qui quitte le domicile conjugal ne le fait pas forcément de son plein gré. Souvent la séparation est la moins mauvaise des solutions, parce que l’atmosphère au sein du foyer est devenue invivable pour tous – y compris pour les enfants.
Pourtant, le partant est souvent considéré comme le responsable. Tous les torts vont peser sur lui, sans que personne ne se pose la réelle question du pourquoi, du comment, et de ce qu’il va vivre ensuite. Croyez-vous vraiment qu’on choisit de gaieté de coeur de ne plus partager leur quotidien, les voir grandir, évoluer ? Et ce n’est pas toujours la belle vie de se retrouver seul dans un appartement (ou pire un studio), alors même qu’on pouvait rêver de finir sa vie au sein d’un foyer aimant.
Changer de regardpl
A l’heure ou ce phénomène se multiplie, ou les familles recomposées deviennent la norme, et ou un mariage n’est plus un CDI pour l’éternité, il serait peut-être temps de changer de regard sur celles et ceux qui se retrouvent ainsi mis de côté. Ils ne sont pas des parias, des coupables parfaits, mais souvent des parents pas toujours reconnus dans leur rôle.
Quand le parent est nocif, les mesures d’éloignement s’imposent, et il est urgent de les renforcer. La loi doit d’abord protéger les enfants, mais elle peut aussi accompagner leurs parents – quel que soit leur statut.
En tant que célibataire endurci, je n’ai pas franchement d’avis sur la question. De tous mes « potes divorcés avec enfants », quand la garde n’est pas alternée, je ne vois jamais un mauvais oeil sur celui qui n’a pas la garde.
Par contre, il y a un truc que tu cites un peu, c’est qu’on ne voit pas assez les problèmes des célibataires et le coût de la vie qui est plus élevé (surtout s’il a des enfants « à côté » vu qu’il faut un logement assez grand pour les recevoir).
Par ailleurs, je suis un type de la gauche modérée, comme on sait. Il y a un seul événement qui m’a vraiment tanguer, dans ma vie, au point d’avoir envie de remettre en cause cet engagement (évidemment et heureusement, je n’ai pas réussi) : c’est un copain élevant seul sa fille (la mère était à quelques kilomètres mais n’avait pas de revenus) qui, dans la discussion, m’a dit de ne pas trouver normal, avec son faible niveau de revenu, de payer une contribution sur les ordures ménagères (déjà on ne voit pas le rapport). Et j’ai éclaté, je lui ai rappelé qu’en tant que célibataire, on n’avait aucun avantage fiscal et qu’une grande partie des dépense collective n’était pas pour nous mais soit pour les vieux soit pour les jeunes. A titre d’exemple, j’émets par nature beaucoup moins de déchets qu’un type avec un gamin. Je paie pour l’école pour rien. Je paie pour la santé pour pas grand chose (un célibataire entre 20 et 60 ans ne coûte pas grand chose). Je paie pour des équipements collectifs que je n’utilise pas…
Et ainsi de suite…(ça peut aller loin, tu parles par exemple dans ton billet des conditions familiaux de produits alimentaires, mais c’est aussi parce que le célibataire consomme des petites portions que le supermarché peut faire des promotions sur les gros paques).
Le célibataire contribue beaucoup plus que les autres à la solidarité nationale mais n’est pas du tout reconnu comme tel et le sentiment d’injustice est peut-être renforcé chez un type dans ta situation.
[…] ne les valorisent pas, le coût toujours plus élevé de la vie (et quand on est un père divorcé on en paye le prix) empêche de se constituer un peu de patrimoine. Bref, la seconde chance, c’est réservée […]
[…] ya quelques temps, je dissertais sur le rôle du père divorcé que je suis. Aujourd’hui, devenu beau-père au sein d’une famille recomposée, je […]