Comme beaucoup le savent, je suis aussi militant dans un grand parti de gauche (ou tout du moins de ce qu’il en reste). Depuis plusieurs semaines (voire mois) revient dans ma tête une question simple : pourquoi ?
La politique aujourd’hui
Soyons clairs, la politique aujourd’hui est devenue un grand barnum médiatique, dont on ne retient que les petites phrases ou les photos de tel ou tel représentant dans le canard local ou sa présence sur telle ou telle chaine de télévision (si possible en créant la polémique sur les chaînes d’infos). Pour émerger, il faut exposer sa bobine partout, le plus souvent possible et ne pas lésiner sur la bonne formule.
Idem sur les réseaux sociaux : il ne faut pas hésiter à s’exposer, à se montrer, à multiplier les posts et les tweets, à affronter ses contradicteurs pour créer le buzz qui vous fera exploser. L’électeur choisira souvent le plus doué des acteurs, mais pas forcément pour son projet (si tant est qu’il en existe un)
Les appareils
Le poids des appareils rend les choses un peu compliquées … en particulier quand ceux-ci sont anciens et ont beaucoup de mal à se réformer. La désaffection des militants, les statuts et règlements obscurs, les lourdeurs administratives et les contraintes rendent tout projet d’amélioration, de recherche d’efficacité rapidement caduque, parce que remettant en cause la légitimité de ceux qui les dirigent. En clair les idées ne sont bonnes que si elles proviennent de ceux/celles qui sont autorisé-e-s à en avoir.
Pour les autres, on attend juste de leur part d’être de bons petits soldats au service de l’interêt général… si celui-ci sert celui de quelques-uns en particulier.
Et ces mêmes appareils se sont retrouvés paralysés par la crise sanitaire : rien n’était vraiment prévu pour assurer leur fonctionnement en temps de crise, et en l’état, aucune réflexion sur la suite n’a été véritablement abordée. Alors oui, on parle d’idées lancées par-ci par-là, certaines sont même très bonnes, mais il en faudra plus pour ramener l’électeur vers le chemin des urnes.
Le plafond de verre
Comme je le constatais déjà dès le mois de juin, il existe un plafond de verre dans les partis, et je suis en dessous de ce plafond. Pourtant, on pourrait se dire qu’un homme blanc, hétéro, avec un nom ayant la bonne consonance a toutes les chances de réussir … mais non !
Quelle légitimité a la parole d’un ouvrier, seulement bachelier (par deux fois c’est une longue histoire), face a des armées de cadres de la fonction publique, enseignants, professions libérales, ou encore face aux professionnels de la politique qui en vivent depuis des décennies ? J’ai encore aujourd’hui l’impression de devoir justifier de tout, de ce que j’ai le temps de faire ou de ne pas faire (tout simplement parce que j’ai aussi un travail – qui me nourrit – et une vie à côté), de la pertinence de telle ou telle proposition.
D’ailleurs, j’ai aussi remarqué que lorsque les choses sont bien faites, ça en devient presque naturel. Le travail, le temps investi, l’argent parfois ne sont pas pris en compte, seul compte le résultat potentiel. Pourtant (et je renvoie le lecteur vers Maslow), le besoin de reconnaissance fait partie des bases. C’est comme si merci était un gros mot dans ce milieu.
L’impact de l’épidémie
Bien sûr, comme nombre de nos concitoyen-ne-s, les conséquences de la crise sanitaire m’ont amené à revoir certaines priorités. Pour le coup, je me sens aujourd’hui plus préoccupé par l’accomplissement de mes besoins primaires (me nourrir, payer mon loyer, rester en bonne santé), que par les grands enjeux de la société. Pour beaucoup, cette crise a engendré de nombreuses remises en question. Ce qui était considéré comme acquis ne l’est plus forcément, et les priorités de beaucoup de nos concitoyen-ne-s ont évolué. Mais le message porté par les politiques n’a pas encore intégré cette nouvelle donne.
J’avoue aussi que les réunions en visio avec 3 ou 4 présents sur la quinzaine de conviés à sérieusement entamé ce qui pouvait rester de motivation. A quoi bon se casser la tête si, au final tout le monde s’en fout.
Gagner les élections ?
C’est un peu le but… sauf que pour ça il faut s’en donner les moyens. Et la multiplication des candidatures de gauche à plus d’un an de l’échéance présidentielle ne m’incite guère à l’optimisme. Les idées de gauche emportent les suffrages en général lorsqu’elles sont portées de façon unitaire, pas par des candidatures multiples où l’interêt de chaque formation est de rassembler plus de voix que le copain d’à côté et montrer ainsi son hégémonie... qu’elle perd en général dès le scrutin suivant.
Les égos des uns et des autres commencent aussi à me peser sévèrement. Chacun-e des candidat-e-s est convaincu-e d’être le/la meilleur-e de son camp et se lancent alors les grandes manoeuvres pour la suprématie municipale/locale/nationale. En dehors de ça, rien ne les intéresse.
Et clairement, me lancer en campagne pour un tel ou tel autre, en sachant par avance que ça engendrera encore des joutes, des engueulades, des accusations de traîtrise ou autres parce que ça ne plaît pas à untel ou tel autre, je n’y tiens pas.
Le sens de la vie (politique)
Mon engagement a toujours été tourné vers un seul et unique objectif : le progrès partagé. C’est la promesse initiale portée par ma formation politique, celle qui devait lier les militant-e-s, quel que soit leur statut, pour avancer ensemble vers cet objectif commun.
Cet objectif, je ne le retrouve plus aujourd’hui. Je suis lassé des atermoiements de la direction d’un parti rongé par les calculs et le projet indéfini, par la volonté de certain-e-s de s’arroger le leadership et leur tendance à juger à l’emporte-pièce les autres, par cette impression d’être uniquement au service de… et de ne pas avoir le droit d’avoir parfois une opinion différente, d’apporter un éclairage autre. Bref je ne veux plus alimenter la machine à perdre.
Pourtant au fond de moi j’ai encore envie d’y croire. Au milieu de ce marasme j’ai réussi à créer quelques vraies amitiés, sincères et respectueuses, et j’ai encore envie de croire à l’idéal de progrès pour tous, d’amélioration de la vie des gens. J’attends juste aujourd’hui de ne plus être un des derniers à y croire.
Quelle belle (enfin… belle, on se comprend) synthèse.
Puisses-tu être lu et entendu.
(J’ai un doute pour le S à puisses-tu)
Il est à sa place. 2ème personne du singulier ça nécessite un S.
Pour le reste je n’ai que peu d’espoir.